Youssouf Bath, pionnier du Vohou-vohou
Il est d’usage de magnifier les morts. D’en faire des caisses sur leur dépouille encore chaude. Dorénavant, cela doit changer. Aussi allons-nous peindre aujourd’hui un vivant. Un vivant un peu défraîchi, mais bien vivant. Quand on le voit, ça ne saute pas aux yeux, pourtant dans les années 70, ce gars-là a, avec quelques amis, créé un mouvement artistique puissant. Il s’agit de Youssouf Bath, pionnier du Vohou-vohou.
Je voulais consacrer un deuxième article à un autre artiste de génie, Frédéric Bruly Bouabré. Puisqu’il n’était plus de ce monde, ça m’a un peu gêné. Et puis, ça ferait trop de travail. Comme vous avez pu le constater, je n’aime pas trop me crever le cul. Et comme un ver luisant, malgré toute sa bonne volonté, ne saurait faire briller la Tour Eiffel… Aussi me suis-je rabattu sur un autre peintre. Youssouf Bath, pionnier du Vohou-vohou. Et par le plus grand des hasards, il a le même prénom que Youssouf Kourouma.
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Portrait de Youssouf Bath
On le sait : les peintres adorent les portraits, je vais donc en tirer un à gros traits. Youssouf Bath est un peintre que rien n’appelait à la peinture. Il a passé le concours des Beaux-Arts comme ça, comme on regarderait la télé pour tuer le temps. Et comme ça a marché… La vie a horreur qu’on se foute de sa tronche. Après des études en arts en Côte d’Ivoire, il s’installe en France et essaye de vivre pleinement de son art.
Puis, coup de nostalgie ou mal du pays ? On n’en sait trop rien. Un jour, il débarque au bled. Dès lors, il commence à participer à de grandes expositions. En effet, il va prendre part à une grande exposition en 1990 à New York auprès d’artistes comme le peintre sénégalais Souleymane Keita, le sculpteur ghanéen El Anatsui et de l’artiste pluridisciplinaire kényane Rosemary Namuli Karuga.
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Aux origines du Vohou-vohou, le bric et le broc
Youssouf Bath fait partie du vohou-vohou. En résumé, c’est un collectif d’artistes ivoiriens qui ont étudié à l’École des Beaux-Arts d’Abidjan, aujourd’hui appelée INSAAC. Pendant la grave crise financière des années 70, découlant d’un grave choc pétrolier, les étudiants, confrontés à l’austérité budgétaire – aujourd’hui on parlerait de coupes budgétaires -, ont dû eux-mêmes faire preuve d’inventivité. C’est alors que les étudiants mirent en place le système D. Ils commencèrent à trouver des matériaux de fortune pour réaliser leurs tableaux : écorces, végétaux, matériaux recyclables, jus de cola, jus de racine…
Vohou-vohou et son pionnier, Youssouf Bath
Surnommé par ses camarades ‘‘le sorcier Vohou’’, l’art de Youssouf Bath est un mélange d’art, un mix figuratif et abstrait. En effet, il se distingue rapidement des autres peintres par son recours à des matériaux ordinaires pour élaborer des œuvres complexes. Des heures de travail qui éblouissent les admirateurs, les entraînant dans un monde onirique.
Aujourd’hui, le vohou-vohou est devenu un mouvement d’art contemporain. Ainsi Youssouf Bath entre dans la mémoire collective grâce au mouvement dont il est le pionnier : le vohou-vohou. Selon un autre précurseur du Vohou-vohou, N’guessan Kra : « Le Vohou-Vohou est un esprit. Non un esprit de révolte comme celui du dadaïsme, mais un cri d’alarme à l’image de la négritude.«
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